Elsevier

Neurochirurgie

Volume 54, Issue 3, May 2008, Pages 453-465
Neurochirurgie

Rapport 2008 : Traitements chirurgicaux de l’épilepsie
État des lieux et recommandations
La chirurgie de l’épilepsie en France: Évaluation de l’activitéEpilepsy surgery in France: Evaluation

https://doi.org/10.1016/j.neuchi.2008.02.041Get rights and content

Abstract

We report here the results of the first survey on epilepsy surgery activity in France. Data from a questionnaire sent to 17 centers practicing epilepsy surgery were analyzed. All centers responded; however, all items were not completely documented. Over 50 years, more than 5000 patients have been operated on for drug-resistant epilepsy and more than 3000 patients underwent some invasive monitoring, most often SEEG. Currently, nearly 400 patients (including more than 100 children) are operated on yearly for epilepsy in France. Over a study period varying among centers (from two to 20 years; mean, 9.5 years), results from more than 2000 patients including one-third children were analyzed. Important differences between adults and children, respectively, were observed in terms of location (temporal: 72% versus 4.3%; frontal: 12% versus 28%; central: 2% versus 11%), etiology (hippocampal sclerosis: 41% versus 2%; tumors 20% versus 61%); and procedures (cortectomy: 50% versus 23%; lesionectomy: 8% versus 59%), although overall results were identical (seizure-free rates following temporal lobe surgery: 80.6% versus 79%; following extratemporal surgery: 65.9% versus 65%). In adults, the best results were observed following temporomesial (TM) resection associated with hippocampal sclerosis or other lesions (class I: 83% and 79%, respectively), temporal neocortical (TNC) lesional (82%), while resections for cryptogenic temporal resections were followed by 69% (TM) and 63% (TNC) class I outcome. Extratemporal lesional resections were associated with 71% class I outcome and cryptogenic 43%. In children, the best results were obtained in tumor-associated epilepsy regardless of location (class I: 80%). A surgical complication occurred in 8% after resective surgery – with only 2.5% permanent morbidity – and 4.3% after invasive monitoring (mostly hemorrhagic).

Overall results obtained by epilepsy surgery centers were in the higher range of those reported in the literature, along with a low rate of major surgical complications. Growing interest for epilepsy surgery is clearly demonstrated in this survey and supports further development to better satisfy the population's needs, particularly children. Activity should be further evaluated, while existing epilepsy surgery centers as well as healthcare networks should be expanded.

Résumé

Nous rapportons les résultats de la première enquête réalisée sur l’activité de chirurgie de l’épilepsie en France, à partir de l’analyse d’un questionnaire adressé aux 17 centres français qui la pratiquent actuellement. Tous les centres ont répondu au questionnaire, mais certains items étaient incomplètement renseignés. En 50 ans, plus de 5000 patients ont été opérés pour une épilepsie partielle pharmacorésistante et plus de 3000 ont eu un enregistrement invasif intracrânien, principalement une SEEG. Actuellement, près de 400 patients (dont plus de 100 enfants) sont opérés chaque année de leur épilepsie. Sur une période d’étude variable d’un centre à l’autre (deux à 20 ans, moyenne 9,5 ans), les résultats sont analysables chez plus de 2000 patients dont un tiers d’enfants. D’importantes différences entre adultes et enfants sont observées, en termes de localisation (temporale : 72 % versus 43 %, frontale : 12 % versus 28 %, centrale : 2 % versus 11 %), d’étiologie (sclérose hippocampique : 41 % versus 2 %, tumeurs 20 % versus 61 %), et de procédures (cortectomie : 50 % versus 23 %, lésionectomie : 8 % versus 59 %), alors que les résultats globaux sur les crises sont identiques (patients en classe I de Engel après chirurgie temporale: 80,6 % versus 79 %; après chirurgie extratemporale : 65,9 % versus 65 %). Chez l’adulte, les meilleurs résultats sont obtenus après résection temporo-mésiale (TM) avec sclérose hippocampique ou autre lésion (83 % et 79 % en classe I), temporale néocorticale (TNC) lésionnelle (82 %) alors que les résections pour épilepsie temporale cryptogénique n’obtiennent que 69 % (TM) et 63 % (TNC) de classe I. En extratemporal, les interventions pour épilepsie lésionnelle permettent à 71 % des patients d’être libres de crises contre 43 % en cas d’épilepsie cryptogénique. Chez l’enfant, les meilleurs résultats sont obtenus en cas de pathologie tumorale, quelle que soit la localisation (80 % de classe I). Le taux de complications chirurgicales est de 8 % après la chirurgie de résection (2,5 % de séquelles neurologiques) et de 4,3 % après explorations invasives (principalement d’ordre hémorragique).

Les résultats sur les crises obtenus par l’ensemble des équipes françaises se situent dans la partie haute de ceux rapportés dans la littérature avec un taux de complications majeures dans la partie basse. L’intérêt croissant pour ce type de chirurgie est bien démontré par cette enquête. Elle incite à renforcer cette activité de façon à mieux couvrir les besoins de la population, en particulier chez l’enfant, à poursuivre son évaluation et à développer les centres existants et les réseaux de soins.

Introduction

La chirurgie de l’épilepsie a débuté en France en 1957 au centre neurochirurgical des hôpitaux psychiatriques de la Seine (aujourd’hui centre hospitalier Sainte-Anne), par le travail pionnier conjugué de Jean Talairach, de Jean Bancaud et de l’équipe qu’ils avaient composée et qui nous est relaté dans un dernier livre retraçant son histoire (Talairach, 2007). Cette chirurgie était fondée sur des travaux d’anatomie fonctionnelle et de méthodologie stéréotaxique qui ont conduit à l’élaboration de plusieurs atlas, actuellement toujours référents dans les services de chirurgie et d’imagerie fonctionnelle (Talairach et al., 1957 ; Talairach et al., 1967 ; Talairach et Tournoux, 1988 ; Talairach et Tournoux, 1993). Entre 1957 et 1980, année du départ en retraite de Jean Talairach, 262 patients avaient été opérés pour leur épilepsie par une cortectomie et 49 autres patients avaient été traités par une destruction focale stéréotaxique. Au cours de cette période, le nombre annuel de patients opérés, en dehors des destructions stéréotaxiques, variait de huit à 20. Ce nombre serait aujourd’hui considéré comme faible dans un centre pionnier, mais il était l’aboutissement d’une longue démarche d’explorations guidées par un souci de corrélations anatomiques et électrocliniques et conduisant à l’intervention. Cette enquête préopératoire approfondie comportait à elle seule plusieurs gestes chirurgicaux – repérage stéréotaxique, exploration SEEG (parfois répétée) – chez tous les patients, indispensables pour comprendre chez chacun d’entre eux l’organisation dans son espace cérébral de la zone épileptogène et de ses voies de propagation (Talairach et al., 1974 ; Talairach et Bancaud, 1974). Ces explorations justifiaient alors les risques pris lors de la cortectomie et éventuellement ses échecs.

Plusieurs équipes françaises ont dès lors initié cette chirurgie dans le courant des années 1980, selon une méthode issue de l’école de Sainte-Anne dont elles avaient hérité et qu’elles ont su faire évoluer dans leur propre centre. Parallèlement, l’activité de chirurgie de l’épilepsie a continué à Sainte-Anne, l’expérience des équipes pionnières ayant été transmise jusqu’à l’équipe actuelle, transmission dont Jean-Paul Chodkiewicz fut le fidèle défenseur. Enfin, au-delà des frontières françaises, Claudio Munari a apporté en Italie l’expérience de l’école de Sainte-Anne, en collaboration avec l’équipe grenobloise.

Le développement de l’imagerie, des outils chirurgicaux, les résultats de la chirurgie obtenus en France et à l’étranger, a suscité un intérêt croissant et opportun d’équipes françaises pour cette chirurgie fonctionnelle. Il est possible aujourd’hui d’en dresser un panorama exhaustif qui illustre bien à la fois cet intérêt particulier pour ce domaine de la neurochirurgie fonctionnelle, mais aussi et surtout une reproduction assez constante de la qualité des résultats obtenus au sein d’équipes rodées de longue date comme d’équipes plus jeunes.

Section snippets

Méthode

Le questionnaire d’enquête (Annexe) a été adressé aux 17 services de neurochirurgie qui pratiquent aujourd’hui la chirurgie de l’épilepsie en France. Il s’agit des services de Bordeaux, Grenoble, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nancy, Paris Necker, Paris Rothschild, Paris Sainte-Anne, Paris la Salpêtrière, Paris Kremlin-Bicêtre, Rennes, Rouen, Strasbourg, Toulouse et Tours.

Ce questionnaire se proposait d’évaluer l’activité globale de chaque centre depuis son début et d’analyser de façon

Bilan et perspectives

Nous rapportons les résultats de la première enquête nationale concernant l’activité de chirurgie de l’épilepsie. Bien que tous les items sélectionnés n’aient pas tous été renseignés par toutes les équipes, la taille considérable de la population étudiée, avec des données précises chez plus de 2000 patients, apporte un éclairage particulièrement instructif sur cette activité.

La première observation est celle d’un intérêt croissant pour cette activité de neurochirurgie fonctionnelle en France,

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    • Presurgical intracranial investigations in epilepsy surgery

      2019, Handbook of Clinical Neurology
      Citation Excerpt :

      It is our preliminary impression that the SEEG method provides at least a similar degree of safety when compared with subdural grids or strips, in experienced hands. This impression is also shared by others (Devaux et al., 2008; Guenot and Isnard, 2008). Tanriverdi et al. (2009) summarized their experience with a subgroup of 491 refractory epilepsy patients collectively undergoing 2490 intracerebral SEEG electrode implantations and 2943 depth electrode implantations.

    • Planning and management of SEEG

      2018, Neurophysiologie Clinique
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