Journal de Gynécologie Obstétrique et Biologie de la Reproduction
Travail originalÉtude comparative de la version fœtale par acupuncture (moxibustion) versus groupe témoinFetal version by acupuncture (moxibustion) versus control group
Introduction
Les accouchements avec une présentation en siège sont connus pour être plus à risque que ceux en présentation céphalique, que ce soit pour la mère ou pour l’enfant [1], [2]. La prise en charge de ces accouchements est encore débattue.
La tradition chinoise nous apprend que la stimulation d’un point d’acupuncture précis, situé à la face externe du cinquième orteil, nommé « 67 Vessie », favoriserait la version des fœtus qui seraient en siège. Des études ont été publiées en Chine, mais il est possible qu’un échantillon de femmes chinoises ne soit pas forcément représentatif de la population des françaises. L’objectif de l’étude est de mesurer le taux de version fœtale après moxibustion en comparaison d’un groupe témoin.
L’incidence des présentations en siège est d’environ 20 % à 28 semaines d’aménorrhée (SA) [1]. La plupart des fœtus vont se retourner spontanément, et seuls 3 à 4 % se présentent en siège au moment de l’accouchement [2]. Cardini et al. [3] notent que Gottlicher et Madjaric ont calculé une probabilité de version, après la 33e SA, de 15,5 % (IC 95 % 3–28) pour les primipares et de 57,5 % (IC95 % : 36–79) pour les multipares, tandis que Westgren retrouve, mais à partir de 32 semaine, 46 % chez les primipares, 32 % chez les multipares avec antécédents de siège et 78 % sans antécédents de siège.
L’accouchement avec une présentation en siège est connu pour être associé à une augmentation de la morbidité du nouveau-né et de la mère. En effet, c’est la tête qui est la partie la plus large chez le fœtus : en cas d’accouchement céphalique, si la tête passe le reste du corps aussi. En cas de présentation en siège, la tête peut rester coincée, c’est la « rétention tête dernière », au mauvais pronostic. C’est pour cela que de nombreux obstétriciens préfèrent pratiquer une césarienne, notamment dans les pays anglo-saxons. Mais cette dernière présente également un risque opératoire, somme des risques chirurgicaux et anesthésiques. La prise en charge de ces accouchements est donc controversée, notamment entre pays et évolue également avec le temps. Auparavant, l’anesthésie générale avec intubation chez ces femmes enceintes pouvait entraîner une morbidité et une mortalité non négligeable, essentiellement par difficulté d’intubation ou pneumopathie d’inhalation. Depuis la généralisation de l’anesthésie péridurale, puis de la rachianesthésie pour pratiquer une césarienne, cela n’est plus vrai. Une vaste étude publiée en 2000 [2] montrait que la césarienne par rapport à l’accouchement par voie basse diminuait les risques pour le bébé sans majorer ceux de la mère. Mais c’était un travail multicentrique peu homogène, à qui l’on a reproché de nombreux biais de sélection. Cette recommandation n’est pas suivie par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français [4] qui conclut que la voie basse est possible en présence de critères d’acceptabilité définis par des comités d’experts : radiopelvimétrie normale, absence de déflexion de la tête fœtale, estimation pondérale entre 2500 et 3800 g, siège décomplété mode des fesses, acceptation de la patiente. Il souligne également que la version par manœuvres externes (VME) doit être encouragée car elle permet d’augmenter le pourcentage de fœtus en présentation céphalique au moment de l’accouchement, et de diminuer le pourcentage de césariennes. Néanmoins, les VME ne sont pas toujours efficaces, sont potentiellement dangereuses, et pour certains ne doivent être faites que dans un environnement chirurgical. D’autres méthodes ont donc été essayées, qui ont fait l’objet d’une revue de la littérature par Boog en 2004 [5] : méthodes posturales, chiropractie, hypnose et acupuncture…
La tradition chinoise indique que la stimulation d’un point d’acupuncture précis, le 67 V, zhi yin (), augmente le taux de version fœtale. L’ancienneté d’une tradition ne suffisant pas à convaincre la communauté médicale occidentale, plusieurs auteurs ont essayé de répondre à la question. Depuis une revue de la littérature en 1989, qui a fait l’objet du mémoire d’acupuncture de Hayon à Aix-Marseille II, on retrouve 30 nouvelles publications dans la base de données « acudoc2 » (www.acudoc2.org). La plupart sont chinoises et concluent à son utilité, devant une efficacité probable et surtout une innocuité certaine. Néanmoins l’Occident n’a pas été convaincu [6], à cela plusieurs raisons :
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tous les articles ne sont pas traduits, parfois seulement l’abstract est disponible en anglais. Il n’y a pas toujours de groupe témoin, ou parfois il est rétrospectif. L’effectif de l’échantillon est parfois trop petit pour conclure significativement, ou trop grand avec une grande hétérogénéité ;
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quand bien même une étude chinoise conclurait favorablement, un échantillon de femmes chinoises ne saurait forcément être représentatif de la population occidentale et donc les conclusions ne peuvent pas forcément être extrapolées.
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Maternité
Notre étude a été réalisée au centre hospitalier de Saint-Nazaire (CH de SN), en Loire Atlantique. C’est un hôpital général pluridisciplinaire de 1100 lits, disposant d’une maternité de niveau 2B avec 44 lits et sept gynécologues obstétriciens. En 2005, 1900 naissances y ont été enregistrées (1935 en 2006 et 1998 en 2007). Parmi ces derniers, 1818 accouchements ont été uniques avec 3,7 % en siège, soit 68 en un an. Les deux tiers des sièges (48/68) sont nés par césarienne.
Organisation de l’essai
Il s’agit d’un essai
Résultats
Ont été incluses 68 femmes avec 33 dans le groupe « traité » et 35 dans le groupe « témoin ». Il y avait 38 primipares (56 %) et 30 multipares (44 %), âgées de 28,6 ans ± 4,5 (19 – 41) avec un poids moyen de 72,3 kg ± 12,1 (54 – 118), une taille moyenne de 1,63 ± 6,1 (1,50 – 1,79), un IMC moyen de 26,4 ± 4,2 (18,2 – 41,3). L’AG était de 32,2 SA ± 0,8 (30 – 34) à l’échographie, de 33,2 SA ± 0,6 (32 – 35) à la consultation du huitième mois, de 33,9 SA ± 0,4 (33 – 37) à la consultation d’acupuncture, de 37,2 SA ±
Discussion
Nous voulions un essai pragmatique, préconisé pour une application pratique, par opposition aux essais classiques ou explicatifs réservés à un but de connaissance scientifique. La prise en charge d’une parturiente, en France, a ses impératifs, qui peuvent être différents dans d’autres pays. Il y a trois échographies à 12, 22 et 32 semaines. Le dernier trimestre de la grossesse comprend une consultation à huit, puis neuf mois, réalisée donc respectivement vers la 33e, puis la 37e semaine.
Le
Conclusion
Il n’a donc pas été mis en évidence de différence statistiquement significative entre le groupe traité et le groupe témoin pour le taux de version ou le taux de césarienne, que ce soit pour les primipares ou les multipares, avec une puissance a priori un peu limite (60 %).
Références (11)
Les méthodes alternatives à la version par manœuvre externe en cas de présentation du siège : Revue de la littérature
J Gynecolol Obstet Biol Reprod
(2004)- et al.
Moxibustion in breech version: A descriptive review
Acupunct Med
(2002) - Hannah ME, Hannah WJ, Hewson SA, Hodnett ED, Saigal S, Willan AR, for the Term Breech Trial Collaborative Group....
- et al.
Moxibustion for correction of breech presentation
JAMA
(1998) - et al.
Voie d’accouchement en cas de présentation du siège : La position du Collège national des Gynécologues et Obstétriciens Français
J Gynecol Obstet Biol Reprod
(2001)
Cited by (10)
Acupuncture version of breech presentation: a randomized sham-controlled single-blinded trial
2016, European Journal of Obstetrics and Gynecology and Reproductive BiologyCitation Excerpt :This leads to an increase in the prostaglandin F2α/prostaglandin E2 ratio, increasing the tonus and contractility of the uterus and also active fetal movement, thereby increasing the probability of the fetus turning. Several studies have investigated the efficacy of acupuncture on fetal cephalic version, but the results are discordant [11,12,15–25]. Meta-analyses pointed out the heterogeneity of those studies and concluded that there was a need for robust, methodologically sound, randomized controlled trials of adequate statistical power [26–29].
Effectivity of acupuncture and moxibustion in pregnant women with a non-cephalic presentation. A pilot study
2011, Revista Internacional de AcupunturaAcupuncture in obstetrics and gynecology: An overview of systematic reviews
2011, American Journal of Chinese MedicineCephalic version by moxibustion for breech presentation
2023, Cochrane Database of Systematic ReviewsEffectiveness of Moxibustion for Breech Presentation: A Prospective Study
2022, Zeitschrift fur Geburtshilfe und NeonatologieCorrection of breech presentation with moxibustion and acupuncture: A systematic review and meta-analysis
2021, Healthcare (Switzerland)
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Articles en chinois non lus: